L’Afrique s’est engagée dans plusieurs initiatives d’intégration économique et politique, couvrant la promotion du commerce intra-régional comme la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) alors que l’intégration monétaire et financière est restée timorée. Ainsi, les Chef d’Etats et de Gouvernement ont souligné en 2014 dans le cadre de l’article 44 du Traité d’Abuja instituant la Communauté économique africaine et de l’article 19 de l’Acte constitutif de l’Union africaine, le besoin « d’établir une Union Monétaire Africaine à travers l’harmonisation des zones monétaires » et « la création de trois institutions financières panafricaines, à savoir la Banque Centrale Africaine (BCA), le Fonds Monétaire Africain (FMA) et la Banque Africaine d’Investissement (BAI) ». Des institutions qui n’ont toujours pas vu le jour à date. D’où l’urgence selon les experts d’en accélérer la mise en œuvre.
L’Acte constitutif de l’UA prévoit la création de trois institutions financières pour accélérer l’intégration régionale et le développement socio-économique du continent. Il s’agit en l’occurrence de la Banque centrale africaine (BCA), le Fonds monétaire africain (FMA) et la Banque africaine d’investissement (BAI). Pourtant depuis l’adoption de leurs protocoles, rien de concret n’a été fait. En effet, en août 2017, neuf États membres de l’UA avaient signé le protocole du FMA et aucun ne l’avait ratifié pourtant l’Agenda 2063 en prévoyait la mise en place en 2023 avec pour siège Yaoundé. Un retard que les experts attribuent au manque de volonté politique.
“La question tourne autour de la volonté politique. Maintenant on parle de critères de convergence. C’est important oui, mais je trouve utopique d’attendre que tout le monde se conforme de façon totale à l’ensemble des critères techniques de convergence pour décider finalement de la mise en œuvre effective de ces institutions.”
Abbas Mahamat Tolli, Ex-gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) – Tchad
L’urgence d’accélérer l’opérationnalisation des institutions financières de l’Union africaine a été induite par les changements du paysage économique mondial dûs à la fois au Covid-19, aux effets du changement climatique sur l’agriculture, à l’instabilité politique et à l’insécurité. L’une des stratégies préconisées par les spécialistes pour mettre en place ces institutions est l’élaboration d’un programme de sensibilisation pour s’assurer que la classe politique, les médias, le secteur privé, les Gouverneurs des Banques Centrales, les ministères des Finances et chargés des affaires des CER sont bien sensibilisés sur l’ordre du jour et les programmes d’intégration.
“Il est certain que l’Union africaine pourrait avoir des lacunes dans la mise en œuvre de décisions très importantes. Il est peut-être temps pour nous de procéder à une sorte d’auto-évaluation. Puisque nous avons constaté des progrès sous d’autres sphères.”
Mohammed Musa Tumala, Directeur du Département de politique monétaire à la Banque centrale – Nigéria
La perte de souveraineté au profit d’un organe supranational dans la conduite de la politique monétaire et de change reste le principal défi auquel se heurte la volonté politique des Etats pourtant les objectifs de ces institutions sont de faciliter la mobilisation des ressources intérieures et extérieures pour favoriser le développement économique mais également d’assurer la stabilité des taux de change entre les monnaies et leur convertibilité mutuelle.
“Le défi qui nous interpelle aujourd’hui est donc celui de concevoir une stratégie efficace qui soit largement partagée par les parties prenantes afin d’opérationnaliser mais de façon effective, le fonctionnement de ces institutions parce que ce qui est vrai c’est que la vision d’une Afrique forte, unie, prospère et qui parle d’une même voix dans le concert des nations, est ce que nous voulons et c’est possible. ”
Abbas Mahamat Tolli, Ex-gouverneur de la Banque des États de l’Afrique centrale (BEAC) – Tchad
Il ne fait aucun doute pour les experts que la mise en place de la Banque centrale africaine, du Fonds monétaire africain et de la Banque africaine d’investissement permettrait au continent de mieux faire face aux chocs économiques mondiaux qui affectent son développement de façon asymétrique tout en promouvant un commerce sans barrière.