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«Nous pouvons être de très bon partenaires et collaborateurs pour réaliser ensemble la vision de la ZLECAF» : Florie Liser, Présidente-directrice générale du Corporate Council on Africa

L'interview : Florie Liser, Présidente-directrice générale du Corporate Council on Africa

Dans cette édition de l’interview, nous avons reçu la Présidente-directrice générale du Corporate Council on Africa, Florie Liser, en marge du 14e Sommet Etats-Unis- Afrique organisé à Marrakech. Elle s’est exprimée l’importance de la collaboration entre les Etats africains et les Etats-Unis pour le développement du secteur privé.

Dites-nous Mme Liser, quelle est la mission du Corporate Council on Africa, une institution peu connue par beaucoup d’Africains?

Nous l’avons créée il y a près de 30 ans, en 1993. Nous fêterons nos 30 ans l’année prochaine. L’institution a été créée pour rassembler les gouvernements des États-Unis et de l’Afrique avec les dirigeants du secteur privé, car nous savons que la croissance économique, tant ici en Afrique qu’aux États-Unis, est véritablement tirée par le secteur privé. C’est ce segment qui crée les emplois et qui attire les investissements dans les pays, notamment dans le secteur de la fabrication et bien d’autres. Le Corporate Council on Africa existe depuis environ 30 ans et nous fournissons l’accès, les réseaux et les connaissances nécessaires pour faire des affaires avec succès en Afrique.

Le Sommet des affaires États-Unis-Afrique se tient cette année sous le thème « Construire l’avenir ensemble » et vous êtes l’un des organisateurs. Quelle est l’idée derrière ce sommet qui intervient au moment où les Etats s’efforcent de se remettre de la pandémie de Covid-19 et de la guerre en Ukraine?

Le thème pour le sommet de cette année était “construire l’avenir ensemble” et nous voulions discuter des moyens d’aider les pays et les entreprises à se remettre de la pandémie de Covid-19 et de l’impact de la guerre russo-ukrainienne. Nous voulions également signaler que c’est un très bon moment pour penser à réémerger et réimaginer les entreprises sur le continent.

Quels sont les secteurs clés en Afrique dans lesquels nous verrons une augmentation des investissements américains après ce sommet? Dans quels domaines pensez-vous que l’Afrique et les États-Unis peuvent renforcer leur coopération pour une reprise économique durable? 

Après ce sommet, ce sur quoi nous devons nous focaliser, ce sont les opportunités pour les acteurs du secteur privé de réseauter et de discuter des partenariats potentiels et d’accords qu’ils pourraient conclure. S’agissant de secteurs clés, nous nous penchons sur la transition énergétique en raison des enjeux liés au changement climatique. Il existe de nombreuses opportunités d’investissement dans les énergies renouvelables. La santé est un autre domaine clé dans lequel il faudra investir, notamment dans la résilience du système de santé africain. Le CCA est honoré d’avoir des membres comme Pfizer, Johnson & Johnson, MSD, qui sont tous membres de l’institution. Nous avons des initiatives de sécurité et de résilience sanitaires en Afrique, y compris la capacité de produire des vaccins et d’autres équipements médicaux sur le continent. L’Afrique ne devrait pas avoir à attendre les autres pays pour pouvoir obtenir les fournitures médicales et pharmaceutiques dont elle a besoin. L’agro-industrie est un autre secteur clé pour les investissements, avec les TIC et la transformation numérique. Ce sont tous des domaines importants pour l’Afrique, sans oublier le financement. Nous avons eu plusieurs sessions avec des investisseurs institutionnels américains qui gèrent des fonds de pension, des particuliers fortunés et des fondations. Ces sessions ont débouché sur la manière dont ces institutions peuvent investir dans les infrastructures en Afrique. Nous étions vraiment ravis d’avoir Africa50 comme partenaire pour le sommet. 

Avec une population de 1,3 milliard d’habitants, que doit faire l’Afrique pour tirer un accord économique gagnant-gagnant d’un tel partenariat avec les États-Unis? Quel impact le déficit de la balance des paiements peut-il avoir sur le développement des accords économiques?

Je pense que la question clé à l’heure actuelle n’est pas tant celle du déficit de la balance des paiements. La question clé est celle des partenariats qui peuvent être développés dans ce contexte. Je pense que pour les 1,3 milliard d’Africains, ce qui est important, c’est le fait que la Zone de libre-échange continentale africaine, qui couvre tout le continent, a été lancée. Sa mise en œuvre a commencé cette année et elle changera la donne pour l’Afrique à la fois pour accroître le commerce intra-africain, le commerce entre les pays africains et pour permettre à l’Afrique de commercer de manière plus compétitive avec le reste du monde. À titre d’exemple, de nombreux marchés en Afrique sont petits, donc les investisseurs américains, et pourquoi pas les investisseurs d’autres pays, peuvent apporter leurs contributions. La ZLECAF signifie que vous pouvez investir dans un pays africain et avoir accès à tous les autres pays. Encore une fois, cela change la donne et nous avons été vraiment honorés de la présence du secrétaire général du secrétariat de la ZLECAF qui siège à Accra et qui a été chargé par les chefs d’État africains de coordonner la mise en œuvre de cet important accord.

Au moment où les pays africains canalisent leurs énergies vers l’opérationnalisation de la Zone de libre-échange continentale africaine, considérée comme la plus grande zone de libre-échange au monde, la présence américaine n’est-elle pas un frein à cette ambition?

Je pense que la présence américaine est très importante parce que les États-Unis sont l’un des plus grands marchés nationaux au monde. Si le gouvernement américain et le secteur privé peuvent travailler main dans la main avec les gouvernements africains, l’Union africaine et le secteur privé africain, alors nous pouvons être de très bons partenaires et collaborateurs pour réaliser ensemble la vision de la ZLECAF.

Une récente étude de la Banque mondiale montre que la ZLECAF a la possibilité de générer des revenus atteignant les 571 milliards de dollars par an, soit une augmentation de 9% et de sortir près de 50 millions d’Africains de l’extrême pauvreté d’ici 2035, mais les pays africains sont réticents à mettre en œuvre cet accord. Qu’est-ce qui explique cette réticence et quelles stratégies pour remédier à cette situation?

Nous examinons essentiellement les partenariats qui existent en Afrique dans le domaine du commerce. Aujourd’hui, l’Afrique ne représente que 3% du commerce mondial et n’attire que 1,7% des flux mondiaux d’investissements directs étrangers. Ce que nous devons examiner actuellement, c’est quels sont les domaines et secteurs prioritaires, c’est-à-dire comment pouvons-nous encourager les investissements dans les secteurs clés en Afrique et renforcer la base industrielle du continent, en ajoutant de la valeur à ses produits. Il ne s’agit pas seulement d’exporter des matières premières et d’importer des produits manufacturés. L’Afrique a la capacité de fabriquer ses propres produits et d’y ajouter de la valeur, qu’il s’agisse de diamants, de noix de cajou ou de cuivre. L’Afrique dispose de minéraux stratégiques comme le cobalt et ceux-ci sont importants, par exemple, pour les batteries à utiliser sur les véhicules électriques. C’est donc le bon moment d’investir en Afrique dans la fabrication de batteries pour les véhicules électriques car ces derniers remplaceront rapidement les véhicules dépendant du pétrole et des énergies fossiles. Nous avons eu un message vidéo de la vice-présidente américaine, Kamala Harris, lors de la cérémonie d’ouverture de ce sommet annonçant que le gouvernement des États-Unis accueillera le sommet des dirigeants africains du 13 au 15 décembre de cette année. C’est un pas important car la dernière fois que cela s’est produit c’était en 2014 sous le règne du président Obama. Nous remercions donc l’administration Biden-Harris de s’être concentrée sur l’Afrique et d’avoir compris l’importance de l’Afrique et de nos partenaires africains. Le CCA se réjouit d’accueillir les chefs d’État, les ministres et le secteur privé africains aux États-Unis pour le sommet des dirigeants africains en décembre. Merci.

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