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Pamela Coke-Hamilton, Directrice exécutive du Centre du commerce international : « La question de l’accès au financement est un problème à plusieurs facettes »

Dans cette interview exclusive, Pamela Coke-Hamilton, Directrice exécutive du Centre du commerce international, s’exprime sur le développement des échanges entre l’Afrique et les Caraïbes, ainsi que sur le défi de l’accès au financement en Afrique et au Caraïbes.

1-Vous êtes originaire des Caraïbes et vous avez participé au premier Forum Afrique-Caraïbes sur le commerce et l’investissement. Qu’est ce que cet événement représente pour vous?

Pour être honnête, c’est en fait un rêve devenu réalité. Je suis jamaïcaine, mais il se trouve que je suis à 40 % nigériane parce que j’ai fait mon ADN après être allée au Ghana où j’ai visité le Fort de Cape Coast et touché du doigt ce que le commerce transatlantique des esclaves nous a fait. Et je pense que le rapprochement de l’Afrique et des Caraïbes n’est pas seulement important d’un point de vue économique. Marcus Garvey disait qu’il ne s’agit pas seulement de politique et de spiritualité, mais aussi d’économie, car c’est la force économique qui définit qui vous êtes et qui définit votre avenir. C’est le rapprochement de l’Afrique et des Caraïbes qui déterminera notre force pour aller de l’avant au 21e siècle. Cette toute première rencontre Afro Caribéens sur le commerce et l’investissement est donc un pas dans notre direction pour réaliser ce genre de vision. 

2-En juillet 2020, vous avez été nommée Directrice exécutive du Centre du commerce international, un organe conjoint de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement et de l’Organisation mondiale du commerce. Quelles ont été les priorités de votre mandat ces deux dernières années?

Tout d’abord, il faut reconnaître que lorsque je suis entré en fonction, nous étions en plein milieu du COVID et, par conséquent, tout ce que nous avons fait s’inscrivait dans le contexte d’une crise existante. Nous devions donc changer notre mode de fonctionnement, notre façon de travailler pour permettre à l’organisation de continuer à fonctionner efficacement. L’une des choses que nous avons faites est d’examiner les domaines clés qui nécessitent une plus grande attention et qui pourraient être ce que j’appelle un plan de remontée.  

Le premier était la jeunesse. Le fait que, d’ici 2050, plus de 65 % des Africains auront moins de 25 ans, cela en dit long sur ce que sera le forum de la jeunesse en Afrique. 

Le deuxième, c’est les femmes, l’autonomisation économique des femmes. Le fait que le genre va être encore plus important étant donné l’importance de ce que les femmes apportent à la table et l’assurance que l’égalité des sexes devient l’un des piliers du développement économique. 

Le troisième c’est l’écologie, l’énergie verte, la transition verte. Nous sommes tous victimes du changement climatique, nous avons tous vu, rien que cet été, à quel point les choses vont empirer, les pluies, les inondations, etc. L’une des choses qui sera très importante est la façon dont nous passons de l’énergie alternative à l’énergie verte et à l’énergie renouvelable afin de pouvoir faire face au changement climatique, l’atténuer et s’y adapter. 

Le quatrième domaine qui est considéré comme important est celui de l’énergie verte. Nous sommes tous victimes du changement climatique, nous avons tous vu, rien que cet été, à quel point les choses vont empirer, la goutte, la pluie, les inondations, la vidange de l’eau. Si vous n’êtes pas en ligne, vous n’existez pas. L’un des éléments les plus importants est donc de savoir comment connecter une plus grande partie de l’Afrique. Comment faire en sorte que le niveau de connectivité augmente sur le continent africain afin que nous puissions profiter de la ZLECAF.  l’autre gros morceau c’est le processus d’intégration. Nous avons été l’un des plus importants acteurs de la ZLECAF, nous avons signé un protocole d’accord avec la ZLECAF et aujourd’hui, nous gagnons avec AFREXIMBANK et c’est un élément essentiel pour nous en termes de soutien à la croissance, au développement et à l’expansion de l’Afrique.

3-Vous avez présenté un rapport commercial lors du Forum Afrique-Caraïbes sur le commerce et l’investissement 2022 sur les niveaux d’exportation entre l’Afrique et les Caraïbes. Quelles sont les principales conclusions et recommandations de ce rapport? 

La première conclusion qui peut paraître surprenante est que le commerce est au mieux négligeable, 0,1%, ce qui franchement n’est pas honteux mais pas surprenant. La plupart des problèmes à l’origine de cette situation sont liés à la logistique, au transport, à la distance, à l’information, à la capacité réglementaire, à l’intelligence du marché, à tous ces éléments. Mais si on les aborde, les opportunités entre les Caraïbes et l’Afrique sont phénoménales. Tout d’abord, il pourrait y avoir un échange commercial d’environ un milliard de dollars d’ici 2026. Entre aujourd’hui et 2026, l’Afrique pourrait augmenter ses exportations vers les Caraïbes de 171 millions d’euros par an, et les Caraïbes vers l’Afrique de 80 millions par an. C’est considérable par rapport à la situation actuelle. En plus des échanges en termes de commerce de services, le potentiel est de plus d’un demi-million de dollars. Et c’est une opportunité phénoménale dans le domaine du tourisme, des industries créatives et des services professionnels. Donc ce que nous voulons faire, c’est trouver comment mettre en place ces mécanismes pour que cela devienne une réalité, quels sont les changements qui doivent être apportés en Afrique et dans les Caraïbes pour permettre à ce type de commerce d’avoir lieu, et cela va des choses telles que la perception, le fait que l’Afrique est loin, personne ne dit jamais que la Chine est loin. Nous importons de Chine, personne ne le dit jamais.  Il s’agit donc de la perception que nous avons de l’Afrique et des Caraïbes et, honnêtement, des constructions coloniales qui ont été mises en place au fil des ans, vous avez la Métropole et puis vous avez les satellites et nous avons tous été des satellites. Et les satellites ne se parlent jamais entre eux ; ils parlent aux métropoles ; C’est en ceci que ça change, commençons à nous parler, à commercer sud-sud, comment nous nous engageons et comment nous nous remettons ensemble avec les mêmes personnes parce que c’est ce que nous sommes; il se trouve simplement que nous sommes à l’autre bout du monde. Ce sont là, les principales conclusions et les opportunités sont claires, voyons comment nous pouvons agir pour que cela se réalise. 

4-Que fait le Centre du commerce international pour soutenir le commerce intra-africain par le biais de la Zone de libre-échange continentale africaine?

L’un des principaux domaines dans lesquels nous travaillons, outre le fait que nous travaillons également avec le secrétariat de la ZLECAF sur les négociations tarifaires et sur les bonnes pratiques, l’un des éléments clés sur lequel nous avons travaillé est d’aider les entreprises à utiliser la ZLECAF, car l’une des choses que nous avons vues, et ayant travaillé dans les Caraïbes au niveau international dans l’hémisphère, l’un des plus grands témoins des accords commerciaux est qu’ils sont beaux sur le papier, mais le secteur privé ne les utilise jamais, du moins dans les pays en développement. Nous avons donc des tonnes d’accords commerciaux, nous en avons une pléiade, tous très bien rédigés, mais le secteur privé ne sait pas comment les utiliser. Nous avons donc produit, en partenariat avec Afreximbank, un module sur la façon d’exporter dans le cadre de la ZLECAF et nous avons formé différents partenaires du secteur privé, différentes institutions, sur la façon d’exporter dans le cadre de la ZLECAF, sur la façon d’utiliser l’accord, sur la façon de tirer parti des opportunités. C’est l’un des principaux éléments qui nous ont permis de contribuer à la mise en œuvre de la ZLECAF. Nous avons également l’observatoire du commerce en Afrique, qui est l’un des éléments de la ZLECAF, et ce qu’il fait, c’est qu’il fournit une sorte d’information dont le secteur privé a besoin sur les différentes barrières au commerce, les règles sur les exigences etc. Il fournit donc une sorte de portail d’information qui permet aux entreprises de prendre des décisions et aussi de soumettre la concurrence sur leurs marchés.

5-Les entrepreneurs et les petites et moyennes entreprises en Afrique ont des difficultés à accéder au financement. Comment soutenir ces entreprises et comment résoudre efficacement le problème d’accès au financement?

La question de l’accès au financement est un problème à plusieurs facettes. Premièrement, le financement traditionnel continue de dominer. Et parce que la finance traditionnelle continue à dominer, beaucoup de banques et d’institutions qui offrent des financements ne savent pas comment mesurer la propriété intellectuelle, ils ne savent pas comment attribuer de la valeur à une idée. Ils veulent toujours une garantie, un morceau de papier qui dit que vous possédez cette parcelle de terre ou cette voiture ou autre chose ; Ces exigences sont toujours un facteur, vous devez montrer un contrat de travail, ce sont des mécanismes anciens qui continuent à dominer. Quelques-uns des domaines dans lesquels nous avons travaillé concernent l’accès au financement : recherche d’investisseurs providentiels, recherche de capital-risque, recherche de fonds de capital-risque qui peuvent être utilisés pour aider les entrepreneurs. Je pense que ce qui va être très important, c’est de travailler aussi avec certaines des institutions traditionnelles pour changer leur perception et leur perspective en termes de financement : les nouvelles idées, le financement, l’esprit d’entreprise, la création de ce genre de capacité et nous avons travaillé avec quelques banques pour le faire. C’est un processus lent mais je pense qu’il s’accélère, car de plus en plus de banques réalisent que si elles n’investissent pas dans les jeunes entrepreneurs, si elles n’investissent pas dans les jeunes, elles seront perdantes à long terme. 

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