Plus de 250 millions de personnes d’ascendance africaine vivent hors du continent, aux côtés de millions d’Africains sur le sol natal. Leur rôle va bien au-delà de la nostalgie : elles représentent un véritable levier de transformation. À Alger, diplomates, universitaires, cinéastes et entrepreneurs créatifs venus d’Afrique, d’Europe, des Amériques et des Caraïbes ont lancé un message fort : l’Afrique ne veut plus seulement être racontée, elle veut désormais écrire et diffuser son propre récit..
À Alger, au-delà des échanges commerciaux et des promesses de contrats, la 4ᵉ Foire commerciale intra-africaine 2025 a ouvert un espace inattendu : une table ronde consacrée aux récits de la décolonisation. Un détour par l’histoire pour interroger le présent et esquisser l’avenir. Car sur les 55 États membres de l’Union africaine, 53 ont connu la colonisation. Les chemins vers l’indépendance ont varié: négociation pour certains, guerre et sang pour d’autres. Mais partout, une même question demeure : qui écrit aujourd’hui cette histoire, et avec quelle légitimité. Les panélistes ont posé le débat : reconnaître les souffrances et restituer aux peuples africains la capacité de raconter leur trajectoire.
“ Si vous avez des talents africains qui dépendent de l’économie occidentale et qui ne peut pas aujourd’hui exercer son talent parce que cette économie occidentale ne se mettra jamais au service des causes que veulent défendre ces artistes africains, Nous n’aurons pas l’émergence.”
KARIM ZERIBI , Consultant média – Algérien
Si l’Afrique a longtemps été l’objet de récits venus d’ailleurs, elle a produit dès la colonisation ses propres contre-discours. De Frantz Fanon à Assia Djébar, d’Ousmane Sembène à« gougi wa Thion-go » , écrivains, cinéastes et militants ont forgé un imaginaire décolonial. Aujourd’hui, la diaspora poursuit ce travail : édition, cinéma, recherche, industries culturelles, autant de canaux pour réécrire l’histoire collective. Mais un problème persiste, les moyens.
“Il faut conquérir ces territoires de récits, mais il faut aussi assumer qu’il faut des moyens pour produire des récits de qualité, factuelle qui peuvent réparer.”
NAIMA YAHI, Historienne – Algérie
Le lancement de CANEX Creations Incorporated par Afreximbank est une réponse claire aux besoins de transformation du potentiel créatif africain. A ce jour, la banque a déjà mobilisé jusqu’à 2 milliards de dollars pour les industries culturelles africaines : studios de cinéma, stades, arènes musicales, centres de mode, mais aussi formation et distribution.
“ Nous avons 2 millions d’euros de fonds de faciliter pour l’industrie créative. Nous avons un fonds de cinéma, mais nous avons aussi établi une entreprise appelée Canex Creations Incorporated, qui est une entreprise qui gère les propriétés intellectuelles.”
Temwa Gondwe, Directeur créatif et Diaspora Afreximbank – Malawi
Chaque année, la diaspora injecte près de 100 milliards de dollars dans l’économie africaine, bien au-delà des 73 milliards de l’aide publique au développement. Un poids financier qui, selon les experts, doit ouvrir la voie à une autonomie culturelle et économique. Car derrière ces milliards, se joue bien plus que des chiffres : l’indépendance du récit africain et l’avenir même du continent.



