Décryptage : La Banque Arabe pour le Développement Économique en Afrique- BADEA a reçu une première notation de Aa2 avec une perspective positive de l’agence Moody’s. Valorisant le management d’une institution dépourvue de dette, l’agence de notation indexe le solide capital de l’institution, son niveau élevé de liquidités et le large soutien de ses États membres. Des arguments pour avoir accès désormais aux marchés internationaux de capitaux. Une stratégie que nous détaille en exclusivité Docteur Sidi Ould TAH, le directeur Général de la BADEA.
1- Moody’s Investors Service (« Moody’s ») a attribué le 18 février 2022 à la Banque Arabe pour le Développement Économique en Afrique (BADEA) une note Aa2 avec une perspective positive pour ses emprunts en devises à long terme. Une belle symbolique, car ce 18 février 2022, vous avez célébré le 48ème anniversaire de la BADEA. Que représente cette notation pour la BADEA ?
C’est une reconnaissance ! La reconnaissance d’une très solide situation financière, d’une trésorerie excédentaire et surtout d’une gouvernance forte et d’un soutien remarquable de la Banque africaine de développement (BAD) aux actions de la Banque Arabe pour le Développement Économique en Afrique (BADEA). Ces informations étaient bien connues de ceux qui ont l’habitude de travailler avec nous. Mais avec la note de Moody’s Investors Service (« Moody’s »), c’est toute la communauté internationale qui est informée de la situation de la BADEA et qui pourra aussi suivre au quotidien l’évolution de la BADEA.
1- Comment expliquez-vous cette attente de 48 ans pour voir l’attribution d’une note Aa2 à la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA)? Quelle a été votre stratégie pour atteindre cet objectif depuis votre prise de fonction ?
Il convient de rappeler que la BADEA, pendant plus de 40 ans, a surtout opéré avec le secteur public. Ce n’est qu’à partir de 2015 que la BADEA s’est lancée dans le financement du secteur privé et du commerce. C’est une nouvelle orientation qui a appelé à des réformes, à l’adoption de nouvelles politiques et d’un nouveau cadre de gestion de risque. Tout cela à conduit la banque à s’ouvrir plus à des partenaires étrangers. Ce qui demandait d’avoir à leur dire. Et donc il y a eu parallèlement à cela, la préparation de la stratégie BADEA 2030, qui a été un long processus participatif qui a culminé en 2019 avec l’adoption de la stratégie BADEA 2030. Tout cela à permis à la banque de s’engager dans un processus de leasing qui a culminé aujourd’hui avec l’obtention de cette note qui ne sera certainement pas la dernière bonne note de la banque.
2 -La BADEA procède à l’exécution de sa stratégie 2030, cette notation valorise une perspective positive pour vos emprunts en devises à long terme. Quel en sera l’impact sur votre mode de financement, particulièrement dans des monnaies qui sont utilisées en Afrique ?
Comme vous le savez, la BADEA jouit d’une très solide situation financière et d’une trésorerie excédentaire, ce qui fait que la banque continuera à financer une bonne partie de ses opérations à travers ces ressources propres. Mais, étant donné l’importance de l’accès au marché, la BADEA mobilisera des ressources auprès des marchés des capitaux pour fournir encore suffisamment de capitaux, particulièrement pour des monnaies qui sont utilisées en Afrique.
3 -La BADEA a une structure de gouvernance exceptionnellement solide, qui ne lui permet de ne prêter qu’à des pays non-actionnaires. Malgré le risque élevé perçu en Afrique Subsaharienne, où avez-vous accès au marché des capitaux internationaux ?
La Banque sera amenée encore à renforcer sa politique de gestion des risques et aussi à développer de nouveaux outils qui lui permettront de mieux répondre aux besoins de ses demandes de ses bénéficiaires, tout en observant les meilleures pratiques en matière de gestion de risque et en matière de financements.
4- Estimées entre 85 et 95 millions en Afrique, les micros, petits et moyens entreprises (MPME) sont l’un des quatre piliers de la stratégie 2030 de la BADEA. Ces deux structures économiques, viviers de l’emploi en Afrique ont été mises à rude épreuve par la pandémie de Covid-19. Quelle est votre stratégie dans leur processus de reprise post-covid-19 ?
Nous travaillons déjà d’arrache-pied avec tous nos partenaires pour réellement apporter des solutions appropriées pour les PME, pour les accompagner au niveau du financement, du renforcement des capacités et au niveau la mise à disposition des meilleures pratiques mondiales en matière de gestion de ce type d’entreprises. Nous avons lancé récemment une coalition mondiale d’appui à la Micro, Petites et Moyennes Entreprises en Afrique. Cette coalition nous permettra de mettre tout autour de la table, les différents partenaires concernés par la question pour apporter des solutions intégrées, qui mettent à contribution tous les opérateurs, toutes les parties prenantes, qu’ils s’agissent des bailleurs de fonds, de fonds de garantie, de toutes les agences qui fournissent les services d’accompagnement et surtout toutes les parties prenantes qui sont concernées par le développement des petites et moyennes entreprises.
5- Le 1er janvier 2021, la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) est devenue opérationnelle. Quelle est la stratégie de la BADEA pour accompagner la mise en œuvre de cet espace d’échanges ? Quel message adressez-vous à chaque pays africain souscripteur de vos offres devant ces nouvelles perspectives de développement ?
Nous pensons que c’est une grande opportunité pas seulement pour l’Afrique, mais pour le monde, car l’Afrique est le marché d’aujourd’hui et le marché de demain. La BADEA a dans le cadre de sa stratégie BADEA 2030 et surtout dans le cadre de son huitième plan quinquennal BADEA 2020 – 2024, nous avons lancé ce que nous appelons la facilité africaine du commerce. Cette facilité est destinée à aider les pays africains à renforcer leur capacité en matière d’exportation, mais aussi de développer des échanges intra-africains et les échanges entre l’Afrique et le reste du monde. Et donc nous pensons que cette stratégie devrait accompagner la mise en œuvre de la ZLECAF. Et nous avons déployé deux ressources sous forme de don, notamment le renforcement des capacités, la mise à niveau des opérateurs pour tirer profit de ce libre-échange économique.
6 – Il y a 48 ans, 18 pays visionnaires, membres de la ligue des Etats Arabes (LEA) se sont réunis pour créer la BADEA. Depuis le début des opérations en 1975, la banque a financé plus de 720 projets du secteur public et a fourni plus de 850 dons d’assistance technique dans 44 pays d’Afrique en renforçant leurs capacités d’accès aux prêts dit confessionnels. Quels regards et perspectives portez-vous sur le renforcement de la coopération économique, financière et technique entre les régions arabes du continent et Africaine ?
Je pense que plus que jamais, la coopération économique entre le monde arabe et l’Afrique Subsaharienne devient une nécessité pour les deux parties. Au niveau de la BADEA, nous sommes un acteur important pour le renforcement de cette coopération et nous pensons que les défis auxquels fait face le monde, qu’ils s’agissent du covid-19 ou des autres défis actuels que nous connaissons, impose au deux parties de développer des complémentarités et nous oeuvrons au renforcement des investissements dans les deux régions particulièrement pour l’exploitation des ressources naturelles en vue de la création de valeurs ajouté nationale et la création des emplois pour les jeunes et les femmes et l’évolution vers un marché commun pour les deux monde.
Docteur Sidi Ould TAH, Merci d’avoir été l’invité d’Africa 24