Au Libéria, la mémoire des deux guerres civiles reste vive, plus de vingt ans après la fin des violences. Le 5 juillet 2024, le président Joseph Boakai a présenté des excuses officielles de l’État lors d’une cérémonie à Monrovia.Ce geste symbolique relance le débat sur la justice et la mise en œuvre des recommandations de la Commission vérité et réconciliation.Mais l’absence de tribunal continue de nourrir le sentiment d’impunité dans le pays.
Le 5 juillet 2025, Joseph Boakai, président du Libéria, a présenté des excuses officielles au nom de l’État pour les violences et atrocités qui ont marqué les deux guerres civiles du pays, survenues entre 1989 et 2003. Lors d’une cérémonie de réconciliation à Monrovia, capitale libérienne, il a exprimé la responsabilité de l’État dans les souffrances infligées à des centaines de milliers de victimes. Cette déclaration intervient dans un contexte où le pays peine encore à tourner la page des atrocités commises durant ces conflits, qui ont fait près de 250 000 morts et laissé des millions d’autres traumatisés, victimes de massacres, de viols de masse et de recrutements forcés d’enfants-soldats.
“ À cette occasion historique, je présente des excuses formelles de la part de l’État. À chaque victime de notre guerre civile, à chaque famille brisée, à chaque rêve fracassé, nous disons : nous en sommes désolés. l’État aurait pu faire davantage .Nous devons faire tout ce que nous pouvons pour nous assurer qu’il ne vous fasse plus défaut. ”
JOSEPH BOAKAI, Président de la République – Libéria
Cette initiative s’inscrit dans un processus de réconciliation amorcé en 2009 par la Commission vérité et réconciliation (CVR), qui avait recommandé des excuses officielles et la création d’un tribunal pour juger les crimes de guerre. Si le geste du président Joseph Boakai marque un progrès symbolique dans la quête de justice, l’impunité demeure persistante. Aucune mesure judiciaire n’a encore été prise, en raison notamment des lourdes influences politiques exercées par des figures ayant joué un rôle central dans ces guerres civiles. Le président libérien a néanmoins réaffirmé son engagement à suivre les recommandations de la CVR, laissant entrevoir une possible évolution dans les mois à venir.
“Les excuses du président Boakai sont un premier pas, mais elles ne suffisent pas à soulager les victimes. Ce qu’il faut maintenant, c’est concrétiser la promesse de créer un tribunal pour juger les responsables des crimes commis. Le Libéria, à lui seul, n’en a peut-être pas les moyens.C’est pourquoi il serait judicieux de faire appel à une structure internationale, comme l’ONU, pour garantir que justice soit rendue. Ce tribunal pourrait non seulement permettre de réhabiliter les victimes, mais aussi agir comme une véritable épée de Damoclès au-dessus de ceux qui seraient tentés de replonger le pays dans la violence.”
Kerwin MAYIZO, Analyste politique – RD Congo
Les excuses prononcées par le chef de l’Etat soulignent un tournant dans la reconnaissance officielle des souffrances endurées par le peuple libérien. Toutefois, pour que ce geste prenne tout son sens, il faudra aller au-delà des paroles et traduire les engagements en actions concrètes. Les observateurs insistent sur l’importance de la mise en œuvre des recommandations de la CVR pour déterminer si le Libéria, après plus de deux décennies de silence et d’impunité, saura enfin offrir réparation aux victimes et mettre un terme à l’héritage destructeur des conflits passés.



