La capacité de l’Union africaine (UA) à mettre fin au conflit, conformément à son mandat de promotion de la paix et de la stabilité à l’échelle du continent, suscite des interrogations. Pour relever le défi de la résolution pacifique des conflits, le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki, a nommé un groupe ad hoc de haut niveau sur le Soudan, composé de Mohamed Ibn Chambas, Speciosa Wandira-Kazibwe et Francisco Madeira, chargé de mener des efforts de stabilisation.
Le conflit entre les Forces armées soudanaises (SAF) dirigées par le général Abdel Fattah al-Burhan et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (RSF) du général Mohamed Hamdan « Hemedti » Dagalo est entré dans son quatorzième mois. Compte tenu de l’impact humanitaire et des conséquences régionales, cette lutte pour le contrôle du pays constitue l’un des pires conflits internes du continent. En effet, selon les estimations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies, depuis le 15 avril 2023, plus de 13 000 personnes ont été tuées dans cette lutte. Au moins 10 millions de soudanais ont fui leur foyer et environ 25 millions de personnes, soit près de la moitié de la population soudanaise, ont besoin d’une aide et d’une protection humanitaires. Speciosa Wandira-Kazibwe, ancienne membre du Panel de haut niveau de l’UA sur le Soudan, estime qu’il est crucial de faire davantage participer les femmes dans les processus de résolutions des conflits sur le continent.
“Nous devons être panafricanistes. Si vous n’êtes pas panafricaniste, vous ne pouvez pas assurer la paix en Afrique parce que les batailles sont partout. Dans la santé, dans l’agriculture, dans l’industrie, partout.
Et en tant que femme, vous le ferez dans la douleur parce que c’est dans la douleur que vous avez toujours accouché. Ceux qui sont prêts à faire naître l’Afrique dans la douleur sont donc rares.”
Speciosa Wandira Kazibwe, Membre du Panel de haut niveau de l’UA sur le Soudan – Ouganda
Les combats ont repris dans certaines régions connues pour leur précarité, en particulier le Darfour et le Kordofan. Speciosa Wandira Kazibwe, relève que la participation des femmes est insuffisante dans la prévention des conflits. A ce titre, elle milite pour la contribution significative des femmes aux initiatives locales de médiation. Cette défenseuse des droits des femmes, a été de 1994 à 2003 vice-présidente de l’Ouganda, la première femme en Afrique à occuper un tel poste.
“ J’étais une jeune femme d’une vingtaine d’années, je venais de fonder une famille et j’ai rejoint le parti démocratique et la guerre s’est poursuivie après les élections multipartites. Si vous voyez l’appartement où j’habitais, vous verrez des blessures par balles. Je peux vous dire que je comprends les habitants des localités qui vivent dans la peur des conflits parce que je l’ai moi-même vécue.”
Speciosa Wandira Kazibwe, Membre du Panel de haut niveau de l’UA sur le Soudan – Ouganda
Chirurgienne titulaire d’un doctorat en sciences de la santé mondiale et de la population de la Harvard School of Public Health est également membre de l’initiative Champions for an HIV-Free Generation. En tant qu’Envoyée spéciale pour le VIH/sida en Afrique, Speciosa Wandira-Kazibwe a contribué à faire progresser la riposte au sida en Afrique en plaidant pour l’engagement et la participation proactifs de tous les secteurs de la société. Dans ses attributions de membre du Panel de haut niveau de l’UA sur le Soudan, Speciosa Wandira-Kazibwe est appelée à travailler avec les forces civiles, forces militaires et acteurs régionaux et mondiaux comme l’IGAD, l’ONU et la Ligue arabe, afin de garantir le retour à l’ordre constitutionnel et de la stabilité au Soudan.
“Nous devons rassembler les femmes à un niveau plus technique. Des femmes directrices de la santé, des femmes directrices ou commandantes dans l’armée, et les former à ces questions cruciales, domaine professionnel par domaine professionnel. Nous en avons parlé lorsque j’étais au Soudan et que l’on m’a demandé où étaient les femmes. En effet, nous avons constaté qu’on leur demandait un certain type d’expérience pour participer au processus de rétablissement de la paix. Mais certaines femmes sont déjà générales dans leur foyer.”
Speciosa Wandira Kazibwe, Membre du Panel de haut niveau de l’UA sur le Soudan – Ouganda
Speciosa Wandira Kazibwe a siégé à diverses commissions et conseils locaux, régionaux et internationaux et a dirigé une mission nationale d’observation des élections de l’Union africaine au Libéria en 2011 et à Maurice en 2019. En tant que première présidente du Comité des femmes africaines pour la paix et le développement de l’Union africaine, elle s’est mobilisée et a plaidé pour la participation active des femmes au leadership et aux initiatives de paix et de développement de l’Afrique. Speciosa Wandira Kazibwe croit en l’utilisation des données probantes pour les politiques, la gestion et l’engagement efficace des communautés et des parties prenantes comme une voie nécessaire à la transformation socio-économique de l’Afrique.
