Le Tchad a décidé de rappeler son ambassadeur au Cameroun, après avoir appris le rachat, par la Société nationale des hydrocarbures du Cameroun, de 10% des parts Savannah Energy, nouvel acquéreur des parts de Exxon Mobile dans cotco l’une des sociétés qui gère le pipeline de transport de pétrole brut des champs du sud tchadien vers Kribi pour exportation vers les marchés internationaux. Cotco, société de droit camerounais, est contrôlée depuis fin 2022 par Savannah Energy, une compagnie britannique qui a racheté les parts d’Esso, filiale du géant américain ExxonMobil, mais avec laquelle le gouvernement tchadien est en désaccord et qui exploite désormais des champs pétroliers. Pour des experts, les relations Tchad – Cameroun ne peuvent être juste minées par une affaire d’acquisition d’actifs au sein d’une société.
Depuis le 20 avril 2023, le Tchad a décidé du rappel de son ambassadeur à Yaoundé, dénonçant des “agissements répétés” de certains représentants du Cameroun au conseil d’administration de COTCO qui mettent à mal les relations entre les deux pays, spécifiquement sur le dossier du pétrole tchadien, passé aux mains d’une société britannique dénommé Savannah Energy depuis décembre 2022. Le Tchad s’oppose à la transaction qui a permis à Savannah Energy de reprendre les parts du groupe américain ExxonMobil dans le projet.
“L’exploitation du brut tchadien portait sur environ 25 et 30 ans or, le premier baril a coulé exactement en octobre 2003, nous sommes aujourd’hui en 2023, ça fait 20 ans. Donc, les grandes compagnies ne terminent pas les contrats. Elles se disent qu’à cinq ans de l’épuisement du puits, il vaut mieux que je vende. Au moment où elles vendent, à ce moment, ce ne sont pas les grandes compagnies qui vont se bousculer. C’est en général des compagnies moyennes et Savannah fait partie des compagnies moyennes parce que ce type de compagnies n’a pas besoin de grands volumes et leur coût de production n’est pas aussi élevé que les grandes. Donc, Savannah Energy n’est pas une grande compagnie mais ce qui est sûr, c’est que c’est une compagnie qui fait déjà dans l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures et ce sont eux qui se sont présentés pour reprendre les parts d’ExxonMobil. De mon point de vue, il n’y a pas de problèmes puisque ExxonMobil qui est une compagnie sérieuse listée, a trouvé que c’était un bon repreneur.
La prise de participation ou en tout cas l’entrée dans le capital de Savannah de privés camerounais, si nous nous mettons même dans une logique d’intégration régionale, on devrait plutôt s’en féliciter. Parce que si on reste dans la logique libérale, si ce ne sont pas des Camerounais, ce serait des privés venus d’ailleurs. Il me semble simplement qu’il y a peut-être d’autres informations qui m’échappent ou qui nous échappent.”
Daniel Claude Abate, Vice – Président du Haut conseil des affaires de la CEEAC
Le Tchad et le Cameroun partagent une frontière longue de 1094 kilomètres et coopèrent pour la sécurisation de leur frontière commune et dans la lutte contre Boko Haram dans le bassin du lac Tchad. Étant enclavé, le Tchad acquiert de nombreuses marchandises via les ports de Kribi et de Douala au Cameroun. Les deux pays, qui ont toujours des échanges réguliers au plus haut niveau, entretiennent officiellement des relations diplomatiques depuis 1960.
“Je pense qu’au plus haut niveau, les deux chefs d’Etat, conscients des intérêts communs, stratégiques que les deux pays partagent, ils ne peuvent pas mettre cela en péril simplement pour un différend qui porte sur des cessions d’actifs. Il me semble que les intérêts des deux pays sont largement supérieurs à cela.”
Daniel Claude Abate, Vice – Président du Haut conseil des affaires de la CEEAC
Contrairement au Cameroun qui a une économie diversifiée, le Tchad dépend des hydrocarbures à plus de 75% pour ses revenus d’exportations. Le regard est désormais tourné vers les dirigeants des deux pays pour la résolution de cette question qui préoccupe les autorités tchadiennes.