Chaque année, des visiteurs viennent de loin pour observer ce qui semble impossible : des crocodiles cohabitant paisiblement avec les habitants de Bazoulé. On se demande s’ils sont dangereux, ou s’ils ont accepté cette étrange alliance. Entre légende tombée du ciel et rites ancestraux, ces reptiles attirent la fascination et le respect. Ici, chaque geste, chaque offrande raconte l’histoire d’une cohabitation unique au monde.
À 45 minutes de route de Ouagadougou, le village de Bazoulé, fort de ses 1 500 habitants, s’impose comme l’un des sites touristiques les plus singuliers du Burkina Faso. Ses célèbres crocodiles sacrés, des crocodiles du Nil installés dans une mare depuis des siècles, attirent chaque week-end des trentaines de visiteurs. Selon la légende, ces reptiles seraient apparus miraculeusement il y a 570 ans, mettant fin à une terrible sécheresse. Une histoire qui continue de façonner l’identité profonde du village.
Un jour, en allant chercher de l’eau, c’est là qu’ils se sont accrochés au milieu de la forêt qui baladait. Et après le soir, les crocodiles sont venus dans le village mais ils n’agressaient personne. Et comme les gens savent que où il y a des crocodiles, il y a toujours de l’eau, ils les ont suivis petit à petit pour aller trouver qu’ils ont créé un grand trou sous les buissons pour y faire leur nid. Et l’eau ne finissait pas. Même pendant la sécheresse, il y avait toujours de l’eau. Et chaque fois, la population partait dans leur trou pour aller puiser de l’eau et ils ne faisaient pas de mal.
Kaboré Alfred, Guide à la marre aux crocodiles sacrés – Burkina Faso
Chaque année, la fête Kom-Lakré rend hommage à ces animaux devenus totems et protecteurs de la communauté. Jadis, leurs terriers remplis d’eau permettaient aux femmes de puiser sans risque, renforçant la relation de confiance entre humains et reptiles. Aujourd’hui encore, les crocodiles circulent librement, cohabitant paisiblement avec les habitants. Ce lien sacré ne se brise que lorsque les femelles protègent leurs petits, rappelant qu’ils restent avant tout des animaux sauvages.
Ils ont décidé de ne plus faire de mal ni de tuer. Et comme c’est les crocodiles qui les ont trouvés de l’eau, ils disent que même si un crocodile meurt, enterrez-le comme un être humain. Parce qu’il est devenu comme un être humain pour nous. Donc ça fait que si un crocodile meurt, on l’enterre comme un être humain, on fait des cérémonies pour eux. Et chaque année, on organise une grande fête de joie et de reconnaissance pour les crocodiles qui sont là.
Kaboré Alfred, Guide à la marre aux crocodiles sacré – Burkina Faso
Le site touristique, dont l’accès coûte 1 000 francs CFA, voit les visiteurs offrir un poulet de 2 000 francs CFA pour formuler vœux de santé, protection ou réussite. Avec près de 10 000 visiteurs par an, Bazoulé tire une part importante de ses ressources de cette activité touristique unique. La renommée du village dépasse désormais les frontières, portée par ces crocodiles sacrés qui incarnent à la fois la mémoire, la croyance et la fierté de toute une communauté.



