À Ouidah, les 22 et 23 août 2025, le public venu assister aux quatorze représentations des groupes musicaux pratiquant le Gbèhoun a découvert bien plus qu’un simple spectacle. Il a retrouvé une mémoire sonore, un battement ancien porté par un instrument unique : le Kpanou, assiette ferforée entourée de morceaux de métal, dont les vibrations dictent chaque pas et chaque souffle de la danse.
Traditionnellement confié aux femmes, le Gbèhoun ne peut exister sans les Kpanous, ces assiettes perforées auxquelles sont fixées de petites pièces métalliques. Ce sont elles qui les frappent en cadence, faisant surgir un rythme sec et profond, comme une parole martelée sur le sol. Dans les villages, le son des Kpanous annonçait autrefois une assemblée, la résolution d’un conflit ou la naissance d’une tontine. Il marquait un temps à part, un moment où la communauté se retrouvait. Aujourd’hui, le défi est double : conserver la maîtrise de ce geste et redonner sens à ce langage. Car si les Kpanous font danser, ils transmettent aussi un savoir ancien. Leur résonance traduit une pensée, une injonction, parfois une prière. À Ouidah, les jeunes femmes ont manié ces assiettes sonores avec virtuosité, preuve que la transmission de ce patrimoine reste vivante.
Le Gbèhoun était en voie de disparition. Je trouve formidable cette initiative qui vise à promouvoir ce rythme musical traditionnel. Je remercie le promoteur du projet et je suis convaincue que nous irons de l’avant, en exportant ce rythme à l’international, car il contribue à la valorisation socioculturelle de notre pays.
Gracia Tossou , Chanteuse et danseuse du groupe Gbèhoun Sètondji
Les savoir-faire collectifs, comme la fabrication des Kpanous où les femmes achètent les assiettes qu’elles remettent ensuite aux forgerons pour perforation et ajout des pièces métalliques se perdent peu à peu dans les zones urbaines. L’initiative du Centre International d’Art et de Musique de Ouidah (CIAMO) vise à documenter ces gestes et à les transmettre aux nouvelles générations.
Le Gbèhoun était un vecteur de communication et de solidarité. Aujourd’hui, il doit redevenir cela. C’est pour cette raison que nous avons initié ce projet : réveiller le Gbèhoun, avec toute sa chaîne de coopération et de renforcement du tissu social. Le Gbèhoun véhicule des valeurs que nous voulons faire revivre à Ouidah et partager au niveau international.
Wilfrid HOUNDJE, Promoteur du projet artistique Les spectacles Gbèhoun
Cette première édition des spectacles Gbèhoun a pour objectif de lancer un projet culturel qui pourrait, à terme, devenir un événement majeur, à l’instar du Carnaval international de Ouidah. La réussite de cette initiative dépendra du soutien des autorités et des partenaires, dont l’engagement est crucial pour transformer cette ambition naissante en rendez-vous culturel pérenne et reconnu.
