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African Union Journal – Interview : Vera Songwe – Secrétaire Exécutive de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique.

African Union Journal : Vera Songwe est la Secrétaire Executive de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique. Dans cet entretien exclusif accordé à Africa 24, elle s’exprime sur la question du développement durable du continent.

Quelles évaluations faites-vous du niveau de croissance économique de l’Afrique dans un contexte de COVID-19?

Malheureusement, on doit dire qu’aujourd’hui, les économies africaines sont mises à rude épreuve et on note une croissance de l’ordre de moins de 4% ou environ 3,5%, largement en dessous des estimations. L’Afrique doit croître d’au moins 8 à 10% pour pouvoir atteindre les objectifs de l’Agenda 2063. Au 35ème sommet de l’Union africaine, nous avions évoqué la croissance parce que, bien sûr, on note une performance économique peu satisfaisante sur le continent. Mais nous avons la possibilité, à travers l’accord de libre-échange continental africain, de relancer et de reconstruire la croissance.

Quelles stratégies de financement à adopter pour garantir la relance des économies africaines?

Premièrement, les économies africaines ont besoin de plus de liquidités. Elles ont besoin de plus de ressources pour répondre à la crise immédiate et mettre en place des infrastructures. On a vu l’importance des TIC, des télécommunications. Nous devons mettre en place les infrastructures dont nous avons besoin. Parlant de transport et de logistique, nous devons renforcer le commerce, nous avons besoin d’infrastructures. Il s’agit donc de plus de liquidités, mais comment pouvons-nous obtenir ces liquidités ? C’est la deuxième question. Nous avons ce qu’on appelle les droits de tirage spéciaux qui sont des ressources données à la communauté mondiale. Un ensemble de ressources nouvellement créées. L’Afrique dispose d’environ 33,6 milliards de dollars de ces ressources et nos dirigeants demandent 100 milliards de dollars auprès de la communauté internationale. Nous avons également des institutions multilatérales de développement qui ont des ressources supplémentaires à donner au continent, mais le troisième aspect qui est le plus important est que nos économies africaines peuvent réellement en elles-mêmes, créer et générer plus de ressources à partir de leurs fonds de pension. Nous devons collecter plus d’impôts, améliorer notre gouvernance, donc je dirai que ce sont les trois stratégies. Nous devons aussi travailler davantage avec le secteur privé une fois que nous aurons obtenu ces ressources, ce qui déterminera comment nous pouvons financer nos économies.

Comment le thème choisi pour le sommet de cette année s’inscrit-il dans le programme de développement de l’Afrique?

Le thème choisi pour cette année en résumé est comment renforcer la résilience que ce soit dans la nutrition, la santé ou le développement socio-économique. Évidemment, avec la nutrition en particulier, nous avons aujourd’hui environ 232 millions de personnes sur le continent qui se couchent le ventre vide et avec le covid 19, nous avons vu quarante millions supplémentaires et plus se couchant pas le ventre vide, mais souffrant de malnutrition. Si vous êtes mal-nourris, votre cerveau ne se développe pas et si votre cerveau ne se développe pas, vous n’êtes pas vraiment un membre utile de la société. Pour chaque dollar investi pour donner aux populations africaines une bonne nutrition, nous regagnons 60 dollars. Le coût d’une bonne nutrition est donc très important pour le continent pour construire un avenir prospère. Deuxièmement, nous devons utiliser des systèmes d’assurance en commençant par l’assurance agricole. De nombreux pays africains ne disposent pas de mécanismes complets d’assurance agricole pour leurs agriculteurs. C’est ainsi que nous soutenons le segment PME de notre population. 70% de nos femmes rurales travaillent dans le domaine agricole. En effet, nous avons besoin de système d’assurance, en particulier lorsque vous pensez qu’une grande partie de l’agriculture africaine est aujourd’hui touchée par le changement climatique. Je pense donc que nous pouvons le faire. Nous devons renforcer la résilience de notre propre économie rurale et comment y parvenir ? Évidemment, c’est par une meilleure gestion des dépenses publiques, une meilleure gouvernance, une meilleure transparence dans la façon dont nous gérons nos ressources. S’il y a plus de transparence dans la gestion de nos ressources, nous faisons plus ou mieux avec moins et il faut donc améliorer cela. Réduire notre niveau d’endettement, améliorer notre système fiscal.

Quelles mesures peuvent être adoptées pour guider l’Afrique sur la voie du développement durable et quels secteurs faut-il aborder en priorité?

Au niveau de l’Union africaine, nous avons déjà l’Agenda 2063 et au niveau des Nations Unies, nous avons l’Agenda 2030. Nous avons également une liste de 17 objectifs de développement durable à atteindre. Je pense donc que nous connaissons l’orientation politique et nous savons quels sont les projets cibles. Ce que nous devons faire maintenant, c’est la mise en œuvre. Nous devons savoir quelles sont les stratégies de mise en œuvre et comment pouvons-nous y parvenir. Premièrement, je pense que nourrir un enfant, envoyer un enfant à l’école, renforcer les capacités humaines, tout cela nécessite de l’énergie. Aujourd’hui, nous avons encore un bon nombre d’africains sans énergie. Pour transformer et construire des industries, nous avons besoin d’énergie. Je dirai donc que le plus important c’est de commencer par l’énergie, en particulier les énergies renouvelables et durables, en s’appuyant sur des combustibles fossiles plus propres que le gaz.

Quelle est votre opinion sur la contribution du partenariat public-privé à la réalisation des objectifs de développement Agenda 2063 de l’Union africaine?

Les partenariats public-privé ont affiché des résultats positifs dans plusieurs domaines. Ils continuent d’être l’instrument en particulier pour le développement du secteur des infrastructures dans plusieurs parties du monde, tant dans le monde développé que dans le monde en développement. Je pense que les tensions que nous observons parfois dans les partenariats public-privé s’expliquent par le fait qu’il y a un manque de transparence, par le retard accusé pour faire avancer les accords, mais nous voyons de plus en plus de pays africains mettre en place la bonne législation, obtenir les bons cadres de partenariat public-privé pouvant attirer les investisseurs étrangers. Il y a beaucoup d’investisseurs étrangers qui viennent sur le continent. Lorsque nous parlons de partenariats public-privé, on a toujours l’impression que c’est extra-continental, que les entreprises des pays développés viennent s’associer avec les entreprises africaines. Il y a une augmentation des entreprises africaines qui s’associent à leurs gouvernements. C’est une tendance qu’on espère observée le plus souvent parce qu’elle crée des emplois grâce à l’efficacité du secteur privé. Nous devons faire avancer ces projets beaucoup plus rapidement.

Des experts estiment que des infrastructures et des services adéquats et efficaces dans tous les modes de transport et de tourisme sont essentiels pour tirer pleinement profit de la ZLECAF et assurer une reprise économique. Quelle est votre vision de la contribution du secteur des transports dans les pays africains?

Prenons un exemple. Aujourd’hui, le secteur du tourisme contribue pour environ 5 à 15% du PIB dans de nombreux pays. Avec la crise du covid 19, le confinement dans de nombreux pays, le secteur du tourisme a subi un coup dur. Dans des pays comme l’Ile Maurice, la compagnie aérienne a cessé ses activités et dans de nombreux autres pays, les compagnies aériennes sont en difficulté. Mais si nous pouvons collaborer en tant que continent, et c’est l’appel de l’accord de libre-échange continental africain, maintenir nos ciels ouverts, la situation serait beaucoup mieux. Je prends l’exemple d’un pays comme la Gambie. La Gambie n’a pas de compagnie aérienne mais c’est l’un des pays qui compte le plus de touristes en pourcentage du PIB parce qu’elle a ouvert son ciel, en autorisant l’entrée et la sortie. Je pense donc que pour que nous puissions vraiment créer une économie continentale qui croît aussi vite que nous le voudrions, nous devons commencer à utiliser des plateformes communes. L’Union africaine et les dirigeants africains se sont réunis et ont créé un mécanisme commun de transport aérien africain. Nous devons le ratifier. Nous devons également améliorer nos réseaux ferroviaires. Nous n’avons pas suffisamment de réseaux ferroviaires pour transporter nos marchandises. Aujourd’hui, il est beaucoup plus coûteux de transporter un bien d’Addis-Abeba vers Dakar que de le transporter de Beijing vers Dakar. Nous devons réduire les coûts, nous devons améliorer nos infrastructures. Nous avons vu le cas du chemin de fer du Kenya. Il a fallu 7 ans pour que le Kenya rentabilise cet investissement. Donc clairement, les investissements dans les infrastructures sur le continent peuvent être rentables et bénéfiques. Nous devons simplement déployer plus d’efforts et le faire rapidement. Concernant les ports, nous devons améliorer nos ports. Nous avons de très bons ports sur le continent, mais le changement climatique va affecter les niveaux de mer. Nous devons nous assurer que lorsque nous construisons ces nouvelles infrastructures, nous nous assurons également qu’elles sont capables de prévoir les effets du changement climatique. La Commission économique pour l’Afrique a effectué des travaux qui montrent que si nous étions en mesure de fournir les infrastructures nécessaires pour le commerce, nous pourrions augmenter le commerce de 20 à 25% au cours des 5 à 10 prochaines années sur le continent.

Comment un média comme AFRICA24 peut-il impacter la croissance économique et le développement durable sur le continent conformément aux objectifs de l’Union africaine?

Africa24 pourrait faire beaucoup. Je pense que la première des choses est d’informer. Tout d’abord, les citoyens doivent comprendre de quoi il s’agit lorsque nous parlons de l’Agenda 2063, quels sont les objectifs, quelles sont les cibles, comment pouvez-vous participer aux conversations dans votre propre pays. La Commission économique pour l’Afrique vient de lancer ce que nous appelons le réseau des jeunes économistes, où nous travaillons avec des universités et des facultés d’économie à travers le continent pour les faire participer à ce débat, afin d’aider à modéliser leurs économies, et l’impact du changement climatique sur celles-ci. Donc, s’il y a des universités qui nous écoutent, des économistes des universités en Afrique qui m’écoutent aujourd’hui et qui veulent rejoindre le réseau des jeunes économistes, vous pouvez aller sur eca.org et vous pourrez rejoindre ce réseau. Aujourd’hui, nous avons environ 26 universités africaines qui font partie du réseau et environ 700 jeunes économistes qui ont rejoint le réseau. Nous espérons que les discussions que vous apporterez sur votre chaîne pourront ouvrir le débat sur ce à quoi ressemble le développement pour l’Afrique, la bonne gouvernance pour l’Afrique et sur comment nous pouvons rassembler ces éléments pour obtenir une Afrique prospère.

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